L’efficience du Luxe : « Redémarrer va demander du temps » – Arnaud Bazin, Versace.

Publié le par Journal du Luxe

Lassé, « énervé » de son propre aveu par les premières analyses exprimées publiquement aux débuts de la pandémie, Arnaud Bazin, Senior Vice President du Merchandising de Versace, a pris la plume sur les réseaux sociaux afin de partager ouvertement son désaccord sur l’impact de la crise de coronavirus sur le monde d’abord, et sur l’industrie du Luxe en particulier. Le Salon du Luxe Paris a voulu en savoir davantage et lui a donné la parole le temps d’une intervention éclairée. En marge de sa diffusion – en intégralité – sur la plateforme vidéo du Salon, le Journal du Luxe vous en dévoile quelques extraits.

Un impact majeur sur la supply chain

Bien hasardeux seraient ceux tentés de comparer la crise du Covid-19 à celle de 2003, notamment en matière d’impact sur la supply chain. « Il faut imaginer que la plupart des fabricants du luxe se sont arrêtés pendant trois mois, explique Arnaud Bazin, évoquant le fort ralentissement du sourcing des matières premières et des cycles de production. Redémarrer va demander du temps. » L’autre maillon de la chaîne impacté de façon « alarmante » est celui de la création et de la manière de travailler, influant de fait l’organisation, le séquençage et la gestion des stocks des collections présentes et futures.

La résilience du Luxe

Dans un tel contexte, quid de la résilience du luxe ? « Nous n’y sommes pas encore » indique Arnaud Bazin, tout en évoquant la phase de récession actuelle. « Le luxe n’est pas un secteur pessimiste. Il est plutôt de nature optimiste car drivé par la création » précise t-il néanmoins.

Dès lors comment redémarrer ? Comment s’organiser, sur la base d’un monde d’avant en permanence critiqué pour son rythme effréné et sa surproduction ? Arnaud Bazin cite d’un côté quatre groupes et maisons dont il ne doute pas des capacités de rebond pour des raisons bien particulières ; de l’autre, il évoque des marques pour lesquelles l’issue pourrait être fatale. « Après deux mois de confinement et d’arrêt activité, 80% des sociétés de notre secteur vont fortement souffrir et certaines vont disparaître » prédit-il, citant le dernier rapport du cabinet McKinsey.

Vers un Luxe efficient

Pour illustrer ses propos, Arnaud Bazin compare l’économie de l’efficience du Luxe à un régime. En somme, il faut « continuer à faire nos métiers mais en faisant moins », explique t-il. Selon ses sources, 114 trillions de vêtements étaient produits et vendus avant la crise ; pour être efficient, le marché se devra d’être « plus proche de la réalité » et opérer ainsi une réduction drastique de ces chiffres. Cap sur le pragmatisme avec en ligne de mire la profitabilité de chaque action. « Tout va devoir être regardé sous la loupe de l’efficience » schématise t-il en évoquant les objectifs accrus de retour sur investissement, combinés à un « retour sur la marque » où la priorité sera donnée aux vrais contenus. La clé ? La création de valeur de marque dans des stratégies plus client-centric que jamais.

« Le sens, le brand building, le storytelling, va devenir excessivement important. Encore plus qu’avant. »

Retrouvez l’intervention d’Arnaud Bazin – en format vidéo et en intégralité – sur la plateforme de l’édition 2020 du Salon du Luxe Paris.

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