L’ASMR peut-il séduire le Luxe ?

Publié le par Journal du Luxe

Dior, Nars, Chanel : sur son compte Instagram comptabilisant plus de 90.000 abonnés, Emily Dougherty accumule les rouges à lèvres. Au détail près qu’elle ne les porte pas. Emily les coupe, les écrase, les étale, les mélange, les fonds les uns aux autres à travers des vidéos fascinantes mêlant effets de textures et sons nets. Car Emily Dougherty est une artiste ASMR.

L’ASMR et les marques

L’Autonomous Sensory Meridian Response est une stimulation sensorielle empruntant aux codes de la méditation. Sur les réseaux sociaux, les vidéos du genre ont la particularité d’intensifier les sons et les bruits d’ambiance, ces derniers étant parfois mêlés à une voix, incarnée ou off, dont la tonalité et le phrasé ne sont pas sans rappeler ceux employés par les spécialistes de la relaxation.

Dans l’ASMR, on tapote, on caresse, on lisse, on presse, et les marques issues de la grande distribution tendent à s’approprier la méthode. Lors du dernier Super Bowl, la marque Michelob Ultra a ainsi vanté les mérites de sa bière Ultra Gold dans un spot ASMR mettant en scène l’actrice en vogue Zoe Kravitz.

Précurseur, Ikea a également employé cette technique dans sa campagne Oddly Ikea en 2017, tout comme le constructeur automobile Renault qui a récemment initié un partenariat avec le You Tubeur ASMR Zeitgeist pour promouvoir son véhicule électrique Zoé dans un spot orchestré par Publicis.

Signe de l’engouement pour le sujet, lors du CES 2019, Samsung a même présenté aiMo, un outil d’enregistrement dernier cri permettant d’enregistrer, sur mobile, des contenus ASMR sans retouche, y compris à l’extérieur.

Luxe : réintégrer le « toucher » aux stratégies de marque

Si l’ASMR est régulièrement décrié sur les réseaux sociaux pour son aspect jugé « inutile » ou « dérangeant », force est de constater que la sonorité exacerbée de ses contenus s’inscrit dans une certaine quête, celle des sens. Reste à en absorber les codes pour les traduire de façon pertinente dans la tonalité du Luxe…

La société Luxury Escapism, spécialisée dans la curation et la création d’opérations de Digital Art, utilise ainsi l’ASMR dans le cadre de sa nouvelle expérience premium, The Oddly Satisfying Spa. Présentée à New York, cette « Digital Wellness Experience » mêle massages, contenus audio ASMR et méditation en réalité virtuelle. De quoi inspirer de nouveaux scénarios naviguant entre offline et online.

Du reste, alors que les contenus audio – et notamment les podcasts et les playlists – viennent plus que jamais nourrir le storytelling des maisons de luxe, l’ASMR a la particularité de faire appel au son et à la vue pour évoquer un nouveau sens, celui du toucher. Une approche intéressante dans un secteur qui se définit, parmi tant d’autres choses, par l’excellence de ses matériaux. Car à l’heure du tout virtuel – ou presque – les enjeux de la perception et de la ré-appropriation de la matière – au sens organique du terme – sont peut être bien plus significatifs qu’on ne le croit.

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