L’online, principal canal d’achat de produits de luxe d’ici 2025.

Publié le par Journal du Luxe

Les prévisions printanières étaient donc justes. Alors que le cabinet Bain & Company tablait sur une baisse globale de -20 à -35% des ventes de produits de luxe à l’issue de l’année 2020, la tendance semble s’orienter sur une chute de -23% à 217 milliards de dollars.

Une baisse record depuis 2009.

Luxury Data

Avec ces résultats, le secteur signe donc son premier déclin depuis plus d’une décennie. Frappé de plein fouet par l’épidémie de Covid-19, le luxe s’est vu impacté sur l’essentiel de ses catégories de produits, dont une baisse de -30% pour les segments de l’habillement et de l’horlogerie. Dans ce contexte économique incertain, Bain & Company souligne la performance des articles à prix d’entrée qui représentent plus de la moitié des volumes vendus cette année.

L’e-commerce et la consommation locale, facteurs de résilience.

Au terme de ces derniers mois marqués par les mesures de distanciation sociale et de confinement, la part des achats de produits de luxe en ligne a littéralement bondi, passant de 12% en 2019 à 23% en 2020, à 49 milliards d’euros.

« Le commerce en ligne devrait devenir le principal canal d’achat de produits de luxe d’ici 2025. »

Bain & Company – Bain & Company Luxury Study 2020.

« Cette augmentation spectaculaire se fait au détriment du brick-and-mortar » souligne l’étude qui prévoit un « possible déclin des réseaux de magasins en 2021 ». Face à la situation, Bain & Company indique que les marques de luxe devront s’adapter à de nouvelles typographies d’achat, tout en faisant évoluer le rôle de leurs boutiques vers davantage d’expérience client et d’omnicanalité.

Car au-delà de l’hyper-accélération du digital, la crise devrait également consolider certaines tendances émergentes telles que la hausse de la consommation intra-frontalière. « La consommation locale a progressé dans tous les canaux, catégories, générations et niveaux de prix » indique l’étude qui évalue la part des achats effectués localement à 80 voire 85% pour l’année 2020. Selon Bain & Company, cette dynamique pourrait perdurer dans les mois à venir, s’installant durablement à hauteur de 65 à 70%.

L’outsider chinois.

Bien que conséquente, la chute du luxe en 2020 a été en partie amortie par une reprise des ventes plus importante que prévue durant l’été, notamment en Chine où les premiers signes de vigueur se sont faits ressentir dès le printemps. Résultat : le chiffre d’affaires du luxe en Chine continentale a augmenté de +45% cette année, atteignant 44 milliards d’euros.

« Nous avons un monde à deux vitesses avec d’un côté l’Europe et les Etats-Unis, fortement touchés par la deuxième vague et par des incertitudes sociales et politiques, et de l’autre côté la Chine dont l’économie accélère sans relâche jour après jour » analyse pour Reuters Federica Levato, associée chez Bain & Company et co-autrice du rapport.

Une reprise à l’horizon 2021.

Selon le cabinet, les ventes de luxe sur le quatrième trimestre 2020 pourraient enregistrer une baisse de -10%, un chiffre totalement dépendant des restrictions gouvernementales qui pourraient marquer la période-clé des fêtes de fin d’année.

À moyen terme, Bain & Company table sur des « scénarios variés » pour 2021, affichant néanmoins des estimations optimistes allant de +10 à +19% « en fonction des conditions macroéconomiques, de l’évolution du Covid-19, de la reprise des flux touristiques internationaux et de la résilience des clients locaux. » Les experts estiment cependant qu’il faudra attendre fin 2022/début 2023 pour retrouver les niveaux de 2019.

« Les marques de luxe ont connu une année de changements considérables, mais nous pensons que l’industrie sortira de la crise avec plus de détermination et de dynamisme que jamais » analyse Federica Levato. « D’ici 2030, cette industrie sera radicalement transformée : nous ne parlerons plus d’industrie du luxe, mais du marché de l’excellence culturelle et créative des insurgés » précise t-elle en référence aux nouvelles générations des consommateurs du luxe, attentifs aux valeurs de justice, d’éco-responsabilité, d’inclusion et de diversité. Selon Bain & Company, ces jeunes acheteurs devraient générer 180% de la croissance du secteur sur la période de 2019 à 2025. « Les marques gagnantes seront celles qui s’appuieront sur leur excellence tout en réinventant l’avenir avec un état d’esprit activiste. Les acteurs du luxe devront réfléchir audacieusement pour réécrire les règles du jeu. »

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