« Il y a toute une jeune génération qui s’engouffre dans un luxe d’image. » Alexia Delrieu, co-autrice Le Luxe

Cette série de livres est née des questions de mes enfants et de notre entourage, avec Sophie de Menthon, ma mère et co-autrice de l'ouvrage. Leurs interrogations sur la société et sur des sujets aussi élémentaires que complexes nous amusaient mais nous ont aussi fait comprendre que des thématiques d'apparence simples n'étaient pas nécessairement acquises pour eux. Expliquer ces concepts grâce aux livres nous paraissaient essentiels, et l'idée a plu à Gallimard Jeunesse.

Le thème du luxe a été choisi pour plusieurs raisons. Sophie de Menthon était contrariée face au luxe bashing injustifié. Elle souhaitait mettre en lumière le luxe qui fait la renommée de la France dans le monde, qui fait vivre un million de personnes dans l'hexagone et qui profite à un grand nombre d'entreprises.

De mon côté, je voulais dire aux enfants que le luxe n'était pas juste un t-shirt de marque cher. Mon ambition était de valoriser la rareté des produits haut de gamme et les savoir-faire qui en découlent. Je désirais aussi promouvoir des notions moins matérielles, comme le luxe d'être libre, de penser différemment et d'être qui l'on veut. Ces deux visions, l'une tournée davantage vers l'industrie et l'autre plus aspirationnelle, apportent une belle richesse à l'ouvrage, se répondent et se complètent.

Nous sommes à une époque charnière avec l'effervescence autour des réseaux sociaux, la surconsommation et le paraître. Il y a toute une jeune génération qui s'engouffre dans un luxe d'image, en oubliant que le luxe est aussi lié aux choses vraies, à des instants de vie connectés aux autres et non à son smartphone. Nous souhaitions encourager les plus jeunes à profiter des précieux moments du quotidien, que l'on oublie souvent d'apprécier à leur juste valeur.

L'idée d'avoir une préface d'un des grands acteurs de l'industrie était très intéressante. Nous sommes allées vers la direction de la communication de LVMH pour pitcher le projet. Sophie de Menthon a présenté le livre à Antoine Arnault, qui a tout de suite accroché à l'ouvrage et a accepté de rédiger la préface. Notre approche du luxe envers les enfants allait dans le même sens et il nous a vraiment fait confiance. Ses quelques mots pertinents sont alignés avec notre écrit puisqu'Antoine Arnault termine par "le vrai luxe, au fond, c'est d'être soi".

Il ne faut jamais oublier que les biens n'apparaissent pas par miracle. Le luxe n'est pas seulement une marque, il y a tout un savoir-faire et une qualité derrière l'objet. Un sac de fast-fashion ou de contrefaçon diffère complètement d'un sac haut de gamme réalisé par un artisan. Et grâce aux écoles et aux formations mises en place par les entreprises de luxe, beaucoup de métiers d'art renaissent et sont assez magiques, surtout pour les enfants. Les plumassiers, les horlogers, les brodeurs… Ces métiers de rêve peuvent les inspirer et les amener à choisir des cursus scolaires manuels et artistiques.

L'objectif n'était pas d'être radical. Nous souhaitions de prime abord évoquer l'histoire de la fourrure, qui était le principal moyen de se tenir chaud aux siècles derniers. Notre volonté était ensuite de poser le sujet sur la table : a-t-on encore besoin de vêtir une peau de bête pour se tenir chaud ? Est-ce qu'il n'y a pas d'autres matières dont l'esthétisme est aussi prestigieux ? Nous ne pouvions pas parler du luxe aux enfants sans aborder l'éthique et les consommations plus vertueuses.

Nous avons fait une présentation du livre avec des enfants en leur posant la question "qu'est-ce que le luxe pour toi ?". Ils ont pu s'exprimer sur leur vision du luxe et repartir avec un dessin personnalisé de notre illustrateur Henri Fellner qui, je tiens à le souligner, apporte une véritable plus-value artistique et visuelle à l'ouvrage.

Une petite fille nous a dit que son plus grand luxe était d'être allongée dans un lit avec un livre. Un garçon voulait avoir un chien. Une autre enfant souhaitait un stage de poney. Nous avons compris qu'ils avaient de vraies envies et que de leur point de vue, le luxe résidait beaucoup dans les choses non-matérielles et dans les expériences merveilleuses. Nous espérons qu'à l'adolescence, ils garderont en tête ces notions.