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« Nos clients attendent des bateaux plus simples et confortables » Bruno Thivoyon, Groupe Beneteau

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L’histoire du Groupe Beneteau est unique : c’est celle d’un petit chantier artisanal familial fondé en 1884, devenu au fil des années un fleuron national et un leader mondial. Rencontre avec son CEO, Bruno Thivoyon.

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Bruno, quel est votre parcours ? 

Bruno Thivoyon

J’ai commencé ma carrière en 1998 dans l’industrie automobile, chez Valeo, où j’y ai occupé plusieurs postes pendant 22 ans. J’ai donc pu toucher à plusieurs domaines : développement technologique et commercial, innovation, acquisitions, partenariats avec différents pays dans le monde dont le Japon et les Etats-Unis… Puis, j’ai rejoint en 2020 le Groupe Beneteau, d’abord en tant que Directeur financier, puis en tant que Directeur général, poste que j’occupe depuis deux ans maintenant avec Gianguido Girotti. 

Oceanis Yacht 60 - Crédit photo : Gilles Martin-Raget

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Quelle est l’histoire du Groupe Beneteau ?

Bruno Thivoyon

Depuis sa création, notre Groupe a su casser les codes et révolutionner le secteur du nautisme, en mettant au point les premiers bateaux de pêche à moteur de la région, pui en participant à l’essor de la plaisance en France et en Europe dans les années 1960 et en donnant naissance à des modèles iconiques et intemporels comme l’Océanis ou le First, dont le célèbre designer Philippe Starck révolutionna l’intérieur à la fin des années 1980. Nous soutenons également les plus grands navigateurs. Aussi, 140 ans après sa naissance, le siège social du Groupe est toujours à Saint-Gilles-Croix-de-Vie. Nous gardons donc notre ancre en Vendée mais mettons le cap sur le monde entier, avec plus de 8 000 collaborateurs répartis entre l’Europe, l’Amérique et l’Asie. Notre portefeuille comprend une dizaine de marques parmi lesquelles des leaders mondiaux (Beneteau, Jeanneau, Prestige et Lagoon), d’autres marques à fort potentiel (Excess, Delphia) et des marques américaines (Four Winns, Wellcraft). Nous sommes, en résumé, un multispécialiste, ayant développé une expertise sur plusieurs segments de marché, des bateaux à voile aux bateaux à moteur, allant de 4 à 25 mètres ! 

Nous cultivons un savant mélange entre savoir-faire artisanal et excellence industrielle.

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Quelles sont les attentes des clients sur le marché de la plaisance ?  

Bruno Thivoyon

Aujourd’hui, près de 85% des bateaux fabriqués en France sont exportés à l’étranger, et 30% de notre chiffre d’affaires est réalisé aux États-Unis. C’est le plus grand marché du monde, pour la voile et le bateau à moteur. 

En ce qui concerne notre clientèle, elle est très large face à la diversité de notre offre et pour répondre à la diversité des usages et des projets de navigation de nos clients, que ce soit pour une journée ou pour plusieurs jours, en monocoque ou en catamaran etc.  Dans le détail, nos clients attendent des bateaux plus simples et confortables. Nos voiliers monocoques, historiquement dédiés à la performance, ont évolué vers des usages plus diversifiés incluant la croisière tranquille. Les multicoques, avec une meilleure intégration des espaces intérieurs et extérieurs, permettent également à nos clients d’apprécier de véritables « plateformes de vie » sur l’eau, c’est-à-dire d’en faire de véritables domiciles. 

Évidemment, la durabilité est aussi une demande dans le secteur, c’est pourquoi nous évoluons progressivement vers une consommation plus responsable grâce à des propulsions alternatives ou des matériaux responsables. 

En outre, la connectivité est devenue incontournable pour nos clients. Elle résume tous ces enjeux et permet une expérience de navigation améliorée, plus sécurisée, et plus vertueuse. Enfin, on associe souvent le nautisme à un loisir qui serait réservé à une certaine élite, ce qui est faux, puisqu’à partir de 150€ par mois, il est possible de co-utiliser un bateau.

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2024 est une année très symbolique puisque vous célébrez vos 140 ans : quelles activations marketing sont prévues ?

Bruno Thivoyon

C’est une grande fierté car peu d’entreprises familiales françaises atteignent cette longévité ! C’est une année de célébration que nous avons voulue collective, en donnant à nos collaborateurs une place centrale. Ils sont la fierté et l’âme de notre Groupe, et œuvrent au quotidien pour le rayonnement de notre savoir-faire partout dans le monde. C’est pour cette raison que nous avons entamé cette année anniversaire avec eux, en allant à leur rencontre au cœur de tous les chantiers du Groupe.

Cet anniversaire, nous le célébrerons aussi avec nos clients à travers les salons nautiques ou des rendez-vous dédiés sous le thème de "L’innovation depuis 1884".  Nous avons également lancé, en mai dernier, une série de podcasts baptisée “Odyssée”, racontée par le célèbre navigateur français Michel Desjoyeaux, un ami de longue date du Groupe Beneteau.

Ce podcast est une belle opportunité de faire découvrir notre histoire au grand public, à travers les témoignages et les souvenirs de plusieurs personnalités parmi lesquelles Annette Roux, petite-fille du fondateur Benjamin Bénéteau, qui fut à la tête du Groupe pendant 40 ans, ainsi que ceux d’une dizaine de collaborateurs.  De belles surprises sont aussi en préparation à l’occasion du prochain Vendée Globe !

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Comment concilier nautisme et éco-responsabilité ?

Bruno Thivoyon

C’est un des enjeux majeurs auxquels le secteur du nautisme est confronté aujourd’hui. En tant que leader, nous considérons qu’il est de notre responsabilité de promouvoir un nautisme plus durable. Nous avons un devoir d’exemplarité. C’est la raison pour laquelle nous nous fixons des objectifs ambitieux : nous avons pris l’engagement de réduire nos émissions de CO2 de 30% d’ici 2030.  Concrètement, cela passe par des innovations comme le Bénéteau First 44, premier bateau construit en résine Elium® 100% recyclable en remplacement de la résine polyester, ou encore l’inclusion de technologies de foil dans nos bateaux, comme le Figaro Bénéteau 3 ou actuellement notre catamaran hors-bord Four Winns TH36, qui permet de réduire la consommation d’énergie de 30% tout en améliorant sa vitesse et sa stabilité sur l’eau. Nous investissons également dans de nouveaux matériaux plus durables (fibres naturelles, résine biosourcée, résine recyclable, etc.) et dans les propulsions alternatives (électrique, hybride etc.).  Pour que cela fonctionne, il faut toutefois veiller à toujours faire rimer durable et désirable. Pour le dire autrement, la décarbonation du nautisme doit se faire sans concession sur l’expérience client. Aucun secteur ne réussira sa décarbonation sans apporter en retour un service ou un bénéfice supplémentaire à ses clients : plus de confort, plus de calme, plus de stabilité… C’est aussi cela, inventer le nautisme de demain ! 

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Quelle est votre ambition pour les années à venir ?      

Bruno Thivoyon

Si je devais résumer, ce serait de continuer à mener à bien notre mission : celle d’amener sur l’eau les rêves du plus grand nombre. Pour ce faire, nous allons continuer à innover, sans cesse. Ma conviction est que plusieurs notions déjà présentes aujourd’hui le seront plus encore demain.

J’en identifie trois principales, qui font déjà évoluer la pratique du nautisme aujourd’hui et l’influenceront davantage dans le futur : l’intégration des nouvelles technologies (comme l’usage de la data et de l’intelligence artificielle au service de la navigation), la durabilité (une dimension à laquelle les jeunes générations sont de plus en plus sensibles) et l’accessibilité (pour permettre au plus grand nombre d’accéder à la navigation). Par ailleurs, pour rendre la navigation accessible, nous allons continuer à investir dans les services et les nouveaux métiers du nautisme qui sont des métiers d’avenir. En France, nous avons déjà réalisé l’acquisition de Wiziboat, une application mobile qui propose de la location de courte durée de bateaux partagés en libre-service. Wiziboat est aujourd’hui présent sur 20 bases en France ; notre ambition est de rassembler 10 000 membres dans les cinq prochaines années et de créer un acteur majeur sur le marché européen.

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