Chronique
Comment lancer sa carrière RSE dans le luxe ?
Publié le par Véronique Lepinay
Accélérer sa transition vers une économie plus durable, c’est le challenge de toute l’industrie du luxe. Pour mener cette profonde mutation des organisations, les Maisons ont besoin de femmes et d’hommes convaincus et formés.
Qu’ils soient juniors ou seniors, quelles sont les clés de la réussite pour les candidats à ces carrières d’avenir ?
Un changement de paradigme pour les Maisons de luxe. Au-delà des fonctions finance et reporting, où la maîtrise des notions de RSE (Responsabilité Sociale et Environnementale de l’entreprise) est devenue fondamentale, la transformation durable est cruciale pour les fonctions sourcing, marketing produit, production, logistique… Des départements qui doivent justifier de leurs dépenses d’énergie et surtout proposer des solutions concrètes pour transformer la chaîne de valeur et améliorer le E-P&L de l’entreprise. À ces postes, les Maisons ont besoin d’intégrer des talents d’experts qui connaissent les réglementations et les grandes notions de RSE, des talents qui proposent des idées transformantes et mènent les équipes dans de nouvelles directions.
Pour ces recrutements, les cabinets de chasseurs de tête vont chercher des experts RSE. "On ne peut pas être expert en tout" explique avec justesse Caroline Renoux, convaincue de la première heure et qui recherche des profils cadres supérieurs experts RSE depuis 2010. "Si une entreprise recherche un spécialiste du climat, je vais aller chercher un profil ingénieur ; pour les sujets d’éthique, des formations au droit ou aux réglementations auront ma préférence" note cette passionnée de transformation écologique qui œuvre pour professionnaliser les métiers de la sustainability.
Après une période où les recrutements s’orientaient vers des profils 100 % RSE, aujourd’hui les cabinets sont plus exigeants et recherchent des profils à double casquette, par exemple marketing-RSE ou achats-RSE.
Connaître les réglementations. Pour que "AGEC", "gouvernance", "taxonomie" ou "certification B Corp" ne soient plus des mots barbares, il existe plus de 500 formations actives en France. Des formations plus ou moins professionnalisantes, plus ou moins longues, plus ou moins coûteuses. Elles légitiment la démarche du candidat, permettent de comprendre les enjeux et surtout, elles poussent à entrer dans une dynamique d’action.
Juniors et seniors ont une carte à jouer. Pour les juniors, plein d’opportunités qu’il faut saisir en s’appuyant sur une première partie de parcours, pas forcément dans le développement durable, associée à une formation sur les notions RSE, mais aussi en multipliant les initiatives : intégrer des commissions qui travaillent sur ce sujet, participer à des conférences ou suivre les leaders de la transformation durable sur les réseaux sociaux.
Côté senior, il est plus difficile de changer d’entreprise et de métier en même temps, il est donc judicieux de privilégier la mobilité en interne : passer d’une expertise métier vers une mission de transformation durable et encore et toujours, chercher à se former à travers une certification ou un Executive MBA par exemple.
En termes de mobilité interne, LVMH innove en lançant DARE (Disrupt Act Risk to be an Entrepreneur). Le principe : un programme intrapreneurial, incubateur de nouveaux projets portés par des collaborateurs LVMH et dont la raison d’être est de transformer des idées en solutions concrètes pour les Maisons du groupe. C’est ainsi que naît Nona source en 2021, première plateforme de revente des tissus et cuirs des Maisons du groupe n°1 du luxe. Ce projet innovant de circularité dans le luxe est porté par trois collaborateurs issus de Maisons du groupe, 3 profils différents et tous interpelés par la nécessité de transformer le business de façon durable.
"Il faut élever le niveau général dans nos Maisons sur ces sujets clés" déclarait Bénédicte Epinay, directrice déléguée du Comité Colbert, à l’occasion du Webinar RH & Talents du Journal du Luxe le 28 mars dernier.
Une prise de conscience à tous les niveaux de l’entreprise. Et, à terme, chaque collaborateur dans l’entreprise aura une dimension RSE dans sa mission. L’Oréal Paris l’a bien compris et a décidé de former l’ensemble des équipes, un projet mené par Elodie Bernadi, directrice RSE L’Oréal France.
La Fresque du Climat s’est aussi largement installée sur ce créneau de sensibilisation, mais il existe de nombreuses autres initiatives qui permettent d’infuser une culture RSE. Trois exemples pertinents :
- Circul’R, co-fondée par Raphaël Masvigner et Jules Coignard, forme et sensibilise les collaborateurs à tous les échelons de l’entreprise : l’Odyssée Circulaire est un module de formation destiné à tous les collaborateurs et est complété par des formations plus pointues qui s’adressent aux comités de direction et cadres dirigeants.
- La Fresque de la Publicité, créée par l’agence Youmatter, a déjà formé 600 collaborateurs chez les grands acteurs médias, dont TF1 PUB, partenaire pionnier du projet.
- La Fresque de la diversité a été choisie par Frédérique Chemaly, DRH et directrice du développement durable des Galeries Lafayette, car le respect et l’inclusion sont les principales préoccupations des clients du grand magasin.
Savoir travailler en transversalité. Monter des équipes RSE, c’est aussi changer le mindset assez traditionnel des Maisons de luxe. Pour une équipe performante, le mélange des profils est bienvenu : des seniors pour la conduite du changement et des juniors pour l’expertise environnementale. La RSE est un vecteur de collaboration, un excellent moyen de créer du lien dans l’entreprise entre les différents services et co-construire un avenir meilleur.