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« Dans le contexte d'urgence climatique actuelle, seuls les résultats comptent » Bérangère Ruchat, Richemont.
Publié le par Journal du Luxe
Le Journal du Luxe vous offre un aperçu de son dernier Hors-Série "Luxe & Sustainability : Conversation régénérative" avec un extrait de l'entretien mené avec Bérangère Ruchat, Chief Sustainability Officer du groupe de luxe Richemont.
Journal du Luxe
Quelle est votre vision du luxe régénératif et quelles ambitions ce concept traduit-il ?
Bérangère Ruchat
J’essaie d’être toujours prudente avec les buzzwords souvent utilisés dans le milieu du développement durable. Ces dernières années, la notion de régénératif a été beaucoup utilisée pour penser la protection de la biodiversité et essentiellement dans le contexte de l’agriculture régénératrice. Le mouvement B-Corp utilise également beaucoup cette notion. Lorsque l’on fait appel à de nouveaux concepts, il est important de comprendre scientifiquement à quoi ils correspondent : comment mesure-t-on qu’une pratique est plus régénératrice qu’une autre ? Avons-nous des moyens de mesurer scientifiquement et de manière chiffrée un impact positif revendiqué ?
Dans le contexte d’urgence climatique actuelle, seuls les résultats comptent. Un veste travail a été accompli par la plateforme One Planet Business for Biodiversity afin de définir scientifiquement les enjeux de la régénération. Mesurer les impacts sur la biodiversité est beaucoup plus complexe que mesurer les impacts climatiques. Nous avons déjà, depuis quelques années, des standards de mesure sur le climat qui s’appellent les Science Based Targets. La même démarche est en cours pour la nature.
Cela dit, le luxe a un rôle à jouer dans la régénération des écosystèmes. Par conséquent, agir à la source des chaînes de valeur en collaboration avec les producteurs de matières premières s’avère stratégique. De nouvelles formes de collaborations de la source à la création des pièces sont cruciales. De nouveaux partenariats transforment les relations commerciales purement transactionnelles en collaborations innovantes dans lesquelles il ne s’agit pas seulement de financer des projets mais de partager des savoir-faire et d’innover.
Le développement durable ne s’intéresse pas seulement au climat et à la nature mais également aux impacts sociaux. Les pratiques régénératrices peuvent aussi se concentrer sur la régénération d’écosystèmes socio-économiques. Le luxe a un rôle primordial dans ce domaine en préservant des métiers rares, en soutenant des artisans dans des régions parfois sinistrées économiquement. Ainsi, la fabuleuse collaboration entre Van Cleef & Arpels et un artisan du Jura Suisse permet de régénérer le savoir-faire et de redonner un élan à une région en difficulté. Cette dimension me touche particulièrement car j’ai grandi dans ce village au savoir-faire unique dans la mécanique d’Art et qui a subi des revers économiques profonds au cours des dernières décennies. D’autre part, les ateliers, les manufactures et les sites de productions de luxe emploient en Europe plusieurs milliers de femmes et d’hommes. Le luxe a un impact positif sur l’emploi et se régénère avec l’intégration de jeunes talents que j’ai eu le plaisir de voir travailler dans les ateliers. En un mot, le principal levier de transformation, c’est le respect de la matière et des savoir-faire, sans lequel rien ne se régénère et tout se perd.
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Chloé est la première maison de luxe du groupe, mais aussi de l’industrie, à avoir obtenu la certification B-Corp. Comment cette ambition peut-elle s’étendre aux autres maisons de Richemont ?
Bérangère Ruchat
Chloé est une Maison pionnière dans le groupe et dans l’industrie en termes de développement durable. Il s’agit d’une démarche de transformation menée par un leader inspirant et déterminé, en collaboration avec une directrice artistique engagée et une équipe Développement Durable de talent. La dimension humaine d’un tel succès est primordiale. Les équipes sont inspirées par une mission centrée sur l’empowerment des femmes. Certes, la certification B-Corp vient valider et reconnaître les efforts de toutes les équipes, de l’achat des matières premières à la gestion des ressources humaines et à la création, pour ne mentionner que quelques dimensions de la démarche.
L’important, c’est le cadre stratégique de B-Corp qui est totalement holistique et ne se cantonne pas à la circularité ou aux émissions carbone, mais qui touche chaque dimension du travail de la Maison au quotidien. L’ambition ne doit pas être celle de certifier plus de B-Corp : tant mieux si tel est le cas mais ce n’est qu’un moyen de la transformation, pas une fin. L’important c’est le B de “benefit”, qui doit nous obliger à comprendre nos impacts sur toutes nos parties prenantes et cette vision est clairement celle que je veux insuffler à l’ensemble du Groupe. Cela dit, de nombreuses Maisons agissent déjà dans cet espace de l’impact positif. B-Corp, pour moi, c’est avant tout un état d’esprit et une démarche qui propose un nouveau rôle pour l’entreprise dans la société, faite de nouvelles collaborations innovantes.
La suite de l'interview, l'intégralité du Hors-Série ainsi que le replay du Webinar "Luxe & Sustainability" sont à télécharger ici.