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“Il faut cultiver la Brand love tout en ayant conscience que le monde a changé.”- Cédric Dauch, former Byredo.

Publié le par Journal du Luxe

Plus que jamais, le Luxe va devoir jouer les équilibristes pour sortir grandi de la crise de 2020. Harmonisation des stratégies on/offline, balance du sens et de la désirabilité, ajustement de la mission de marque et des nouvelles formes d’existence… Dans le cadre de la nouvelle édition du Salon du Luxe Paris dédié à la Résilience, Cédric Dauch, Global Communications Director former Byredo, livre un décryptage grand angle de ces mutations tendances et retail.

Salon du Luxe Paris : Trois mois après le début de la crise du coronavirus, quel premier bilan pouvez-vous tirer pour l’industrie du luxe dans le monde ?

Cédric Dauch : Le premier bilan qui a été repris par bon nombre de médias, c’est la crise du cash, l’achat à distance et le poids que représente le digital, aujourd’hui, dans notre industrie.

Les marques sont quant à elles dans une quête de lien : comment peut-on être utile en temps de crise, et comment arriver à conserver la désirabilité client au jour le jour ? Une certaine créativité se met en place (…) J’ai bien aimé, notamment, les recommandations de Léa Seydoux pour le CinéClub de Louis Vuitton, ou comment arriver à tuer le temps de manière assez chouette. Cette prescription pour entretenir le lien avec le consommateur, je l’ai trouvée assez intéressante. Il y a une nécessité de s’adapter, d’évoluer et d’être dans des choses très pragmatiques… ce qui n’est pas forcément évident pour les marques de luxe qui essaient plutôt de jouer une carte émotionnelle extrêmement forte dans des logiques de communication classiques.

Pour être un peu plus prospectif, je crois que le poids du digital est à repenser pour beaucoup de marques. Dans le retail, il y a un équilibre des zones à trouver dans la mesure où la crise a touché tout le monde, mais pas forcément en même temps. L’autre bilan est que nous avons tous eu du temps pour réfléchir à nos usages et j’ai le sentiment qu’il va falloir trouver encore plus de sens à l’intérêt de consommer : les marques vont devoir s’imposer cette balance entre désir et respectabilité. Il y aura toujours ce besoin de séduire, de cultiver la “brand love”, mais tout en ayant conscience que le monde a changé. Il faut être capable de se positionner dans une forme de proximité qui fasse sens pour le consommateur.

SDL : Le diktat du “Worry Free” shopping entraîne un bouleversement du cérémonial de vente. Comment voyez-vous la fonction du magasin de luxe en brick-and-mortar dans un avenir proche ? Le grand magasin à l’occidental est-il condamné?”

C.D : Vaste question. Je ne vois pas de condamnation du magasin physique qui supposerait de basculer dans un monde complètement digital, dénué du sens du toucher, de l’ouïe, de l’odorat. Le confinement a alimenté une volonté de re-faire fonctionner tous nos sens, ce qui est, pour moi, l’essence même du magasin d’aujourd’hui. 

Rolex illustre cela parfaitement : le lien qu’il y a entre le digital et le commerce physique est extrêmement intéressant. La maison passe son temps à nourrir le mythe fondateur sur son site avec différentes stratégies : le storytelling produit, la mise en avant d’ambassadeurs (…) Grâce à cela, le consommateur plonge au cœur du livre, au coeur de l’histoire et de la vie, online, de Rolex. La marque et sa désirabilité sont toujours extrêmement fortes. Alors évidemment, la pression média est importante mais la publicité reste très cohérente avec ce qui se passe sur le site et les réseaux sociaux de la maison. Résultat, lorsqu’on arrive en magasin, on sait exactement pourquoi on veut une montre. Et le magasin en lui même devient alors ce temple, quelque chose de très émouvant.

La boutique est un lieu de vie à part entière, à l’exemple de ces grands magasins qui décident d’événementialiser leurs espaces de vente ou de créer des mises en scène phares, comme Gentle Monster. On comprend alors tout l’intérêt de la boutique, sa capacité à faire vivre autre chose. Je ne parle pas d’expositions, ou de performances ; je parle de logiques merchandising nouvelles, en rupture, qui permettent de découvrir des produits complètement différents, avec créativité. La complémentarité entre digital et magasin est vitale pour exister, demain. Je pense également à SKP-S, à Pékin, où Byredo a ouvert une boutique où l’on peut sentir les parfums dans d’énormes bras, façon labo futuriste, avec des morceaux de météorite au milieu de l’espace de vente : physiquement, c’est une autre expérience qui est proposée au consommateur. À partir du moment où l’on arrive à créer du lien entre le physique et le virtuel, le magasin a clairement tout son sens.

La culture de crise dans le management, le cycle de la logomania, le futur du travel retail ou encore la résilience dans le business de l’influence… Découvrez l’intégralité de l’interview de Cédric Dauch, en vidéo, sur la plateforme du Salon du Luxe Paris 2020.

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