Exclusif
Pour les femmes rien ne sera jamais pareil.
Publié le par Journal du Luxe
Le Club des Chroniqueurs du Journal du Luxe présente en exclusivité la nouvelle chronique de Jeanne Bordeau, linguiste, véritable détectrice de tendances sur ce que le langage nous raconte du luxe.
Depuis que je compose des tableaux artistiques de mots en puisant dans des milliers de pages de journaux, j’ai vu l’univers lexical de la femme évoluer. En effet, il n’y pas si longtemps les sujets féminins étaient reliés à la beauté, au quotidien, à des sujets de société légers, aux bons plans et à une consommation non réfléchie. Mais, et tant mieux, « la génération Yoga » a cédé sa place au « #metoo » et au « ras le viol » ! Plus rien ne sera jamais pareil, même pour le luxe.
Le féminin change de dimension et cela change le luxe.
« Féminicide » sera donc l’un des mots de 2019. Avec près de « 149 »femmes mortes à cause de « violences conjugales ». Le 3 septembre, « Marlène Schiappa », la « Secrétaire d’Etat chargée de L’Égalité entre les femmes et les hommes » préside « Un Grenelle des violences conjugales ». Les femmes revendiquent parallèlement la nécessité de « dégenrer ». Dire stop aux carcans des sexes. Le préfixe « trans » est l’un des préfixes de l’année. La question du « transgenre » et de son acceptation fait chavirer une vision trop rose bonbon de la Femme.
On entre donc dans la société « Post MeToo », on en a assez d’un monde « pensé pour les hommes ». La « Cheffe » prend le pouvoir. Oui, l’égalité c’est tout de suite et maintenant : « le féminisme je veux tout » se répand. Et, cette égalité se traduit même par une nouvelle liberté : « avec la loi bioéthique, le père devient optionnel ». Les hommes, eux, se cherchent entre « masculinisme » et « mâle de vivre ». Une autre mode et un luxe responsable ne peuvent que naître de ces bouleversements.
Des figures et des engagements.
Des femmes inspirantes ? Oui, de « Elisabeth II l’insubmersible » à l’actrice « Saoirse Ronan ». Et, il ne faudrait pas oublier le classicisme de « Christine Lagarde » ou « Ursula von der Leyen » à la tête de la Commission Européenne. A propos d’engagement, puisqu’il faut « aimer son âge », il convient de prendre soin de soi avec une « beauté engagée », une « clean beauty », un « écoféminisme ».
Et il convient aussi de respecter « l’écologie cutanée » c’est-à-dire la qualité de vie de sa peau. Evidemment pour s’habiller, on privilégiera la « mode green ». « Le luxe responsable » s’impose : déjà depuis 2012 LVMH s’est engagé avec son « programme Life » pour préserver les ressources. Dior convoque même un décor formé par une forêt d’arbres pour sa « semaine de présentation des collections de prêt-à-porter printemps-été 2020 » à Paris. Hermès annonce dans un manifeste sa volonté de faire un « usage pérenne et raisonné des ressources de la planète ». Le « green » n’est pas l’apanage du néo luxe. Le respect des matières sources et de l’économie circulaire n’est plus un luxe pour les Maisons, qu’elles soient nouvelles ou riche d’une histoire longue. On est responsable, on incarne un « luxe véritablement responsable ».
Universellement engagé.
C’est une parole mondiale qui s’installe sur tous les continents. Une parole au féminin lucide. Si Courbet séduit ses adeptes, c’est également parce qu’il clame haut et fort sa posture de « joaillier écologique ». Même les bâches publicitaires géantes peuvent devenir accessoires de mode, comme l’illustre l’histoire des sacs upcyclés Bilum.
Le beau va-t-il devenir universel ? De Tokyo à Los Angeles, de Londres au Cap, la beauté d’un article luxueux s’appréciera-t-elle selon son style et le soin qu’elle apporte à l’humain et à la nature. Plus ne sera jamais pareil pour la Femme : en éveil face aux défis de la modernité, elle ne veut plus d’un luxe qui oublierait d’être militant.
Jeanne Bordeau, « Les Chroniques de Madame Langage ».