Telfar perturbe l'offre et la demande.
Publié le par Pauline Duvieu
À l'occasion du lancement de sa nouvelle collection, la maison de luxe accessible et engagée a présenté un nouveau système de tarification : plus les produits sont populaires, plus les prix montent.
Telfar révolutionne le modèle de consommation.
Une vente à l'envers. C'est en ces termes que la marque fondée en 2005 a décrit sa toute nouvelle opération. Afin de mettre en avant sa ligne proposée depuis le 27 mars, Telfar a développé une stratégie de commercialisation pour le moins surprenante dans l'industrie du luxe. La maison de mode entend en effet définir ses prix selon la demande.
Concrètement, les articles mis en ligne sont d'abord présentés au tarif de gros, soit largement moins cher que le montant en boutique. Plus les clients achètent le produit, plus son prix augmente jusqu'à atteindre le pricing retail. Mais quand une rupture de stock arrive avant de parvenir au prix final prévu, le tarif sera plafonné définitivement au moment de ce sold-out. Exemple : un sweat est proposé à la vente au montant wholesale de 150 dollars qui augmente petit à petit vers son prix retail de 600 dollars. Si la demande est forte et que la pièce n'est déjà plus disponible lorsque son prix s'établit à 300 dollars, alors ce dernier tarif deviendra le prix définitif.
Un équilibre de l'offre et la demande inversé et à l'encontre des habitudes du luxe.
Les produits les plus populaires seront donc, selon cette logique, les plus accessibles pour le public. Grâce à ce système, la marque emmenée par son designer Telfar Clemens compte briser les barrières tarifaires qui empêchent une grande partie des clients de se procurer un article. "Plus nous y réfléchissions, plus il devenait évident que le modèle de tarification dans la mode n'avait aucun sens. [...] Si nous facturons 600 dollars pour le sweat à capuche, une seule catégorie de personnes l'achètera : la personne qui peut se le permettre" a expliqué Babak Radboy, directeur créatif de la maison lors d'un entretien avec le média Fast Company.
Outre cette ambition de démocratiser l'accès à la mode haut de gamme - comme avec les drops sur sa chaîne de télévision TTV -, Telfar devrait réaliser des économies d'échelle en s'appuyant sur la demande de certaines pièces pour fabriquer les collections en quantités plus importantes et négocier des prix plus bas auprès de ses fournisseurs.
Une démarche diamétralement opposée à la vision de l'industrie du luxe, plutôt habituée à augmenter les prix des biens ultra convoités pour équilibrer l'offre et la demande tout en préservant la notion de rareté. Chanel, Rolex, Louis Vuitton... Encouragées par une solide attractivité, les maisons premium ont ainsi tour à tour entamé des hausses de prix ces derniers mois sur divers segments.