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« La durabilité s’ancrera dans le monde du luxe s’il n’y a aucun compromis sur le design, la beauté ou la qualité » Sonia Le Masne et Albane Richter, Martell.
Publié le par Barbara Haddad
Comment la Maison Martell fait-elle évoluer ses pratiques en direction du green ? Rencontre avec Sonia Le Masne, Directrice Sustainability & Responsibility et Albane Richter, Head of Prestige & Ultra Prestige.
Portraits Express
Sonia Le Masne a d’abord travaillé une dizaine d’années en marketing avant de basculer sur des postes RSE il y a 12 ans, dont quatre années en Suède. Depuis neuf mois chez Martell Mumm Perrier-Jouët, sa mission consiste à accélérer la feuille de route sustainability & responsability du groupe, mesurer les impacts extra-financiers et animer le dialogue et la co-construction avec les parties prenantes internes et externes. Ses partis pris : favoriser les démarches collaboratives et l’intelligence collective. Quant à Albane Richter, passionnée par le Luxe depuis toujours, elle a commencé sa carrière chez Parfums Christian Dior en marketing développement maquillage. Puis, grâce à une mobilité du groupe LVMH, elle a rejoint la branche Vins et Spiritueux qui l’attirait pour sa proximité avec le terroir, la valorisation des savoir-faire et cette idée de convivialité. Head of Prestige & Ultra Prestige pour la Maison Martell depuis novembre 2022, elle a à cœur de faire perdurer ce vecteur d’émotion qu’est le Luxe, au travers d’un produit noble qu’est le Cognac.
Journal du Luxe
Le luxe est-il, selon vous, nativement green ?
Albane Richter
Dans le monde des spiritueux, le luxe est nativement green puisque pour continuer à créer et proposer ces précieux nectars, nous devons choyer la terre qui produit le raisin. D’ailleurs notre vision du luxe au sein de la Maison Martell est de façonner notre héritage avec audace, en mêlant créativité et durabilité. Il ne faut pas oublier que les consommateurs du luxe sont aussi des citoyens de plus en plus sensibles aux enjeux environnementaux, même si cela prend véritablement son sens lorsque cela fait partie d’une histoire globale et non s’il s’agit d’un argument de communication additionnel.
Journal du Luxe
Que sera le luxe d'ici 2030 ?
Sonia Le Masne
Dans notre secteur, où la préservation des terroirs est fondamentale, nous serons encore plus fortement engagés dans des pratiques de viticulture régénératrice. Ainsi, notre premier pilier est de préserver nos terroirs et nous accompagnons les certifications environnementales chez nos partenaires. Pour aller plus loin, dans nos vignobles nous testons de nouvelles pratiques de viticulture : couverts végétaux, traitements bio alternatifs, actions biodiversité, vitiforesterie... pour pouvoir partager ensuite avec l’ensemble de la filière.
Albane Richter
La durabilité s’ancrera dans le monde du luxe s’il n’y a aucun compromis sur le design, la beauté ou la qualité au nom du développement durable. Et il est fort probable que l’on change de paradigme sur la dimension esthétique et que l’on passe par exemple de produits "parfaits" où chaque imperfection devait être éliminée, à d'autres dont l’unicité serait valorisée. Par ailleurs, les matériaux produits avec une "date de fin de vie" seront de plus en plus remplacés par des matériaux régénératifs. Dans l’industrie des spiritueux de luxe, nous savons par exemple qu’une des clés pour tendre vers une production plus responsable repose sur le verre qui est énergivore et pèse malheureusement lourd. Demain, qui nous dit que nos précieux nectars ne pourront pas être encapsulés dans des matériaux tout autres, plus durables ?
Journal du Luxe
Quelles sont les actions mises en place au niveau du groupe ?
Albane Richter
Pour rompre avec l’uniformisation de l’offre et valoriser certains savoir-faire ancestraux, nous avons à cœur de travailler avec des ateliers et artisans français, installés localement depuis parfois plusieurs générations, qui excellent dans leurs domaines. Ainsi, sur un certain nombre de pièces de luxe Martell, nous travaillons avec l’Atelier Beyssac sur la marqueterie de bois, les Ateliers Drevelle pour l’ébénisterie d’Art, Meynard & Fils pour les muselets sur-mesure de nos dame-jeannes, ou encore l'Orfèvrerie d’Anjou pour certaines têtes de bouchon.
Sonia Le Masne
Notre stratégie durable repose sur quatre piliers. Le premier est "préserver nos terroirs" comme évoqué précédemment. Le deuxième "valoriser l’humain" porte sur le bien-être et l’engagement de nos collaborateurs et de nos partenaires. "Agir circulaire" couvre tous les plans d’actions relatifs à notre trajectoire carbone d’ici 2050, avec comme leviers majeurs l’amont agricole, le processus de distillation, les emballages et le transport. Notre quatrième pilier concerne les actions mises en œuvre en faveur d’une convivialité "responsable", qui n’est pas compatible avec une consommation excessive.
L'intégralité de l'interview et les insights durables de nombreux autres acteurs du luxe (LVMH, L'Oréal Luxe, Prada Group, Christian Louboutin, Clarins...) sont à découvrir dans le nouveau Hors-Série digital Green Influence du Journal du Luxe.