Hermès NFT Metabirkin

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La décision Metabirkin révolutionne-t-elle vraiment le droit des NFTs ?

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Ces dernières semaines, la décision Hermès Vs Rothschild a fait beaucoup de bruit. En cause, le célèbre sac « Birkin » de la maison créatrice française Hermès a été reproduit et transformé sous forme de NFTs (les « Metabirkins ») par un artiste américain, Mason Rothschild.

Les tribunaux de New York ont rendu le 8 février 2023 une décision en faveur de la société Hermès, notamment pour protéger ses droits de marque, ce qui a suscité beaucoup de critiques au nom de la liberté d’expression artistique. Qu’en est-il réellement ?

Les NFTs ne sont pas des œuvres d’art.

L’argument principal avancé par Mason Rothschild était basé sur le premier amendement de la constitution des États-Unis, protégeant le « free speech », c’est-à-dire la liberté d’expression. Ce dernier avançait que sa création des Metabirkins était une forme d’expression artistique.

Dès la réception du premier courrier de mise en demeure, l’artiste avait clamé que le premier amendement « me donne tous les droits de créer de l’art basé sur mes interprétations du monde qui m’entoure. » Après rendu de la décision des tribunaux New Yorkais, l’avocat de Rothschild a commenté qu’il s’agissait d’une « journée terrible pour les artistes et pour le premier amendement ».

Cependant, rappelons ce qu’est un NFT. Il s’agit de l’acronyme pour « non-fungible token », c’est-à-dire un « jeton non fongible » (autrement dit qui n’est pas interchangeable.). Il s’agit donc d’un fichier de métadonnées, inscrit dans la blockchain, encodé à partir de la numérisation d’un actif. En l’occurrence, les NFTs ont rencontré un grand succès dans le milieu de l’art, avec beaucoup de NFTs créés à partir de la numérisation d’œuvres d’art.

Toutefois, deux distinctions importantes sont à retenir :

  1. Le fichier numérisé sur lequel le NFT est basé n’est pas nécessairement une œuvre d’art.
  2. Même lorsque le fichier numérisé est une œuvre d’art, le NFT lui-même n’est pas une œuvre d’art, il s’agit d’une sorte de certificat d’authenticité rattaché à une œuvre d’art.

En conséquence, le NFT n’est pas une œuvre d’art, et ne l’a jamais été. Le NFT est un code rattaché à quelque chose qui peut être ou ne pas être une œuvre d’art.

La création d’un NFT peut constituer une contrefaçon.

Une contrefaçon est une utilisation non-autorisée d’un droit de propriété intellectuelle, comme la reproduction d’une marque ou logo, mais aussi d’une œuvre protégée par le droit d’auteur, ou encore d’un dessin ou modèle.

Le sac Birkin de Hermès est protégé par de nombreux droits de propriété intellectuelle. Le modèle du sac, en tant que création originale, est protégé par le droit d’auteur. Il a également été déposé en tant que dessin et modèle. Enfin, les dénominations « Hermès » et « Birkin » ont été déposées en tant que marques. Leur utilisation est donc réservée à la société Hermès.

Une reproduction peut prendre différentes formes. Dans le cadre du sac Birkin, une reproduction pourrait tout aussi bien être un autre sac reproduisant le modèle Birkin, qu’une image reproduisant le sac. La création d’un code associé à un fichier numérique reproduisant les sacs Birkin est donc une reproduction, potentiellement constitutive de contrefaçon. L’utilisation du nom Birkin dans la dénomination des NFTs « Metabirkin » est également une utilisation non-autorisée de droits de propriété intellectuelle.

Le but de la reproduction était commercial.

Dans certains cas, les reproductions d’un droit de propriété intellectuelle non autorisées par le titulaire des droits peuvent être tolérées, par exemple, dans le cadre d’une utilisation strictement à des fins pédagogiques. En droit Américain, il s’agit de la théorie du « fair use » (autrement dit de « l’utilisation légitime »).

La reproduction d’une marque est illicite et constitutive de contrefaçon lorsque cette reproduction entraîne un risque de confusion dans l’esprit du public avec les produits et/ou services du titulaire de la marque.

Dans le cadre de certaines œuvres artistiques, la citation d’une marque ne crée aucune confusion dans l’esprit du public. C’est généralement le cas, par exemple, de la citation d’une marque dans les paroles d’une chanson. Il existe aussi des exemples bien connus d’œuvres visuelles représentant des marques. On pense notamment aux œuvres d’Andy Warhol reproduisant les boites de conserve « CAMPBELL », par lesquelles l’artiste avait exploré des métaphores du consumérisme.

Cependant, dans le cas présent, le jury a retenu que les Metabirkins se sont vendus auprès du public non pas comme un acte de « critique de la société », mais bien pour se prévaloir du nom (et donc de la marque) « Birkin ».

De plus, cette utilisation privait Hermès de l’opportunité de développement commercial que représentent les NFTs. Or, l’effet de l’utilisation sur le marché potentiel est le critère prépondérant dans le cadre de l’analyse du « fair use ». L’utilisation n’était donc pas légitime.

Anna Klein, avocate aux barreaux de Marseille & New York.

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