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« Les acteurs du luxe ne peuvent plus aujourd'hui ignorer les innovations et les promesses qu'offrent les projets munis d'une typologie web3 » Benjamin Grauer, DAOZ.eth

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Bansky Wharf Raft NFT, Web 3.0, Metavers... Le Journal du Luxe s'est entretenu avec Benjamin Grauer, aka Whonose.eth, Co-fondateur et CEO de DAOZ.eth, une Organisation Autonome Décentralisée (DAO) qui s'occupe de créer des projets culturels dans le web3. 

DAOZ conseille, accompagne, construit, produit et livre des projets permettant à des marques, des artistes et des partenaires curieux de développer des cas d'usage pour la technologie des NFTs, sous le prisme d'activités culturelles et artistiques au sens large.

Eric Briones

Quelle est l'histoire du Bansky Wharf Raft NFT ?

Benjamin Grauer

Il y a près de 10 ans, Banksy voyage à San Francisco et le fait savoir en posant une série d'artworks dans la ville. L'un d'entre eux, directement iconique, est le Wharf Rat.

L'œuvre représente un petit rat tenant une pelle et portant des lunettes de soleil jaunes mythiques en forme d'étoile. Il semble avoir creusé un tunnel et on peut imaginer qu'il vient de s'échapper de la tristement célèbre prison d'Alcatraz qui se trouve dans la baie, juste en face de la jetée. Malheureusement, le département des travaux publics de la ville de San Francisco ne l'a pas vu de cet œil et l'œuvre a été rapidement recouverte de peinture industrielle. Elle est détruite, et disparait. Seules quelques photographies de l'œuvre ont survécu sur Internet et dans les livres imprimés sur les travaux de Banksy. Le petit rat, symbole de la libération de l'oppression et des idéaux d'évasion, ne devait plus jamais être revu. Jusqu'à aujourd'hui.

Un fan méticuleux de Banksy a pu récupérer l'œuvre et la confier à des professionnels de la restauration, où des experts ont pu sauver la production originale en utilisant des techniques de restauration de pointe. Conscient que cette œuvre d'art et son histoire sont porteuses d'un sens plus large, il nous a contacté en tant que crypto-natifs ayant une expertise juridique, artistique, informatique et blockchain dans l'espace NFT.

Nous avons eu ensemble l'envie de tokeniser cette œuvre emblématique de Banksy, afin d'éviter qu'elle ne disparaisse à nouveau et de la partager avec une communauté plus grande qui pourrait se rassembler autour des idéaux du Wharf Rat. Nous lançons alors la campagne globale autour des NFTs du Wharf Rat le 18 décembre à 7 heures - heure de Paris -, soit le 17 décembre à 20h - heure du Pacifique.

En premier lieu, l'œuvre originale et physique sera ouverte aux enchères pour 72 heures. La pièce de Banksy a été estimée à 700.000 euros. Cependant, avec la technologie du NFT et l'ensemble de ses utilités affiliées, ainsi qu'en considérant l'actualité des œuvres de Banksy en NFT et notre couverture médiatique broadband, un prix de vente autour des 2.5 millions d'euros me semble plus proche de la réalité. Le NFT est aussi pour la première fois réellement "phygital". Un nouveau type de contrat tokenisé est légalement lié au travail de Banksy sur cette opération, grâce à une licence Creative Commons qui a été développée avec notre partenaire en innovation légale TokenArt (Double PhD en Droit). Et tenez vous bien : la licence est elle-même un NFT!

24 heures après le début de la vente aux enchères, une série de 333 fragments 3D de la pièce sera mis en vente au prix de 0.33ETH - 1.100 euros - chacun. Ces NFTs seront tous uniques et formeront une DAO qui aura des droits de vote et de contrôle sur le NFT de la porte (la version purement digitale, et non le Phygital de la pièce 1/1). Une greenlist, absolument pleine, est en place pour les alliés du projet et ses early supporters.

Enfin, le 20 décembre à 7 heures, heure de Paris, une open edition de Souvenirs NFT du Wharf Rat s'ouvre, permettant au plus grand nombre de s'approprier une version de cette vente historique en acquérant l'une de ces éditions pour 0.033ETH - 110 euros. Au bout des 24 heures, le nombre total de NFTs mintés sera le nombre final en circulation.

Cette opération est évidemment à portée philanthropique. En partenariat avec Miry's List et CPAF, deux organismes de bienfaisance américains majeurs, nous ajoutons aussi une frange NFT For Good dans la campagne en leur reversant 20% des fonds. DAOZ.eth est très actif sur cette typologie de projets à teneur éducative, didactique et politique (wink wink ELYX).

Bansky Wharf Raft NFT
©Bansky Wharf Raft NFT

Eric Briones

Quel est le point de vue de Bansky sur les NFT ? Cela peut-il marquer une étape dans l'histoire des NFTs ? Quel est le rôle de votre société DAOZ dans cette opération ?

Benjamin Grauer

DAOZ est le cerveau collectif pensant derrière l'intégralité de cette campagne. Au travers de notre typologie d'organisation horizontale autonome et décentralisée (ou DAO), nous avons pu créer de toutes pièces un pipeline complet de production de projets NFT à large échelle, de façon collaborative, contributive et collective. Le résultat sort le 18 décembre à 7 heures, heure de Paris, et dure trois jours.

Trois drops différents, aux optiques, innovations et aux prix divers, sont réunis avec l'ambition d'embarquer le maximum de nouveaux entrants dans les NFTs et le web3. Du point de vue historique, les campagnes majeures actuelles sont les campagnes fondatrices de la neo-mythologie du monde de demain. Il est toujours important de se regarder avec l'éternité dans le prisme quand on parle de NFT. La blockchain n'oublie pas, elle nous survivra et il est important de bien la construire car tout y est transparent.

Historique donc ? Probablement, tout comme l'avènement des NFTs et la mouvance de la Blockchain Revolution, de la neo-renaissance (ou digital renaissance). On pourrait même aller jusqu'à décrire ces phénomènes comme les balbutiements des neo-lumières, acteurs de ces nouveaux courants. Les NFTs sont indubitablement la technologie qui sera catalyseur d'un futur radicalement différent. Un changement de paradigme, ou de "BIOS" comme dirait mon ami Yacine Ait Kaci, artiste contemporain et génie visionnaire, créateur d'ELYX, ambassadeur digital des Nations Unies. Mais BIOS, c'est une référence de geek : il faut l'excuser, c'est un diplomate.

En permettant à tous d'accéder à des moyens technologiques de rétribuer la création (ou la contribution ?), et de favoriser les partenariats et le partage au travers des NFTs, nous allons progressivement sortir des modèles "trickle-down economics" centralisés du monde du SMIC et des GAFAM. C'est un changement de fond, qui nécessite une grande attention de la part des acteurs du web3, en essayant toujours de créer la collaboration et l'amélioration communes.

Banksy, lui, est toujours là où on ne l'attend pas. En étant publiquement vocal et engagé depuis longtemps sur les notions de propriété intellectuelle, en encourageant les gens à détourner, remixer et s'approprier son art, et en cachant son identité, même lors de procès sur le copyright, il a permis de créer ce mythe artistique qui le drape de légende en tant qu'artiste, et qui permet aussi de libérer la parole et les peuples grâce à ses œuvres de street art engagées et disposées publiquement dans les rues de villes choisies.

Banksy disait lui-même, en parlant de son incitation artistique : "J'aime à penser que j'ai le courage de me lever anonymement dans une démocratie occidentale et de réclamer des choses auxquelles personne ne croit - comme la paix, la justice et la liberté".

D'une certaine manière, l'idéologie partagée du web3 est contributive, libre, intéroperable : la vision du metavers permise par les innovations de la blockchain et le WAGMI des degens de la NFT culture - "We're All Gonna Make It" est la devise du web3 et des NFTs. Toutes ces injonctions portent le même message que Banksy adresse dans son œuvre.

Quant à son oreille sur cette campagne, disons que plusieurs portes sont ouvertes des deux côtés du salon s'il devient nécessaire de s'entendre à un moment donné.

Eric Briones

La passion des NFTs ou des Métavers est-elle un caprice du luxe ?

Benjamin Grauer

Au contraire, j'aurais tendance à penser l'inverse. L'ensemble de la création de valeur qui est réalisée de manière autonome par l'espace du NFT en ce moment est considérable. Les acteurs du luxe ne peuvent plus aujourd'hui ignorer les innovations et les promesses qu'offrent les projets munis d'une typologie web3. Nike avec RTFKT et Adidas avec Punks Comics et BAYC sont deux acteurs qui ont débuté une opération Metavers réussie, et bien reçue par la culture degen. Les possibles sont toujours à développer sur la suite de ces initiatives et de toutes les marques qui restent à amener dans l'espace ! Mais il suffit de rêver et de collaborer.

Bon, il faut rêver fort ! Pour bouger un degen (les "vrais" fous du NFT, avides de tous ses codes culturels), il faut du rêve. Le degen est toujours assez blasé de nature, ou "bored" (comme les Bored Ape Yacht Club. : "Club NFT" prestigieux du web3).

En tout cas, les NFTs pour le luxe sont alléchants et éminemment inspirants. On peut parler d'une utilité expérientielle, entre accès exclusif, traçabilité infalsifiable, pool de collectionneurs pilotables et drive to store : nombreux sont les avantages d'ancrer ses projets dans le web3 de façon stratégique. Les NFTs permettent aussi de redéfinir la relation entre les marques et leurs consommateurs. Un exemple innovant : les projets peuvent permettre de développer des expériences globales autour de la certification de propriété.

Une célèbre marque de montre Suisse va désormais utiliser les NFTs pour s'assurer de l'authenticité de leurs acheteurs et, ainsi, ne plus demander d'informations personnelles en cas de support. C'est le retour de la vie privée sans négliger ni la qualité ni le service pour les utilisateurs. Pensez aux applications futures dans d'autres industries ! Dream Big !

Le luxe sait que la valeur réside dans la perception et la démarche plus que dans la logique. Lorsque les plus importantes enseignes sur Terre voient se vendre des jpegs (.JPG est le format de fichier des photos) à des montants exorbitants, en pleine crise mondiale pandémico-identitaire, elles ne se moquent pas. Elles s'interrogent.

De notre côté, celui des crypto-natifs, de DAOZ.eth et des "OG" du web3 (ou "Original Gangstas", les pionniers et early adopters des NFT), nous savons que le futur est bâti ensemble.

La démarche globale de tous les contributeurs de notre DAO, de nos interlocuteurs et alliés, et des associés de la SAS, est réellement collaborative. Nous cherchons tous à accompagner les marques, les designers, les artistes et toutes les entreprises du monde centralisé, dans leur entrée dans l'univers du web3, accessible au travers des NFTs et des crypto-monnaies (Ethereum ou ETH principalement).

Il est encore tôt dans le space NFT et beaucoup de projets font n'importe quoi. Le cash grab est aisé, mais encore une fois, la blockchain n'oublie pas. Je pense qu'une approche avide de découverte de ce que l'industrie du luxe peut montrer actuellement est la bonne posture. Il faut cependant qu'elle parvienne à appréhender et comprendre les principes fondateurs du Metavers et du web3, qui sont inévitablement liés à tout bon projet NFT sérieux.

Il est encore tôt pour tout le monde, mais il existe déjà de la compétence, des talents, des organisations et des moyens de co-construire. Il faut dorénavant faire le chemin ensemble. Le Metavers, on y va. Ce n'est pas une lubie ou une bulle.

La convergence technologique et économique est en accélération dans la direction d'un grand changement. L'avènement de la 5G va permettre de sortir les GPU et les CPU de nos appareils (les Cartes Graphiques et Cartes Mères) et d'alléger notre technologie. Ecran transparent et flexible, batterie souple minimale et récepteur 5G seront tout ce qu'il faudra au téléphone dans cinq ans. Les lunettes AR et VR seront juste cela : des lunettes, transparentes et légères, qui permettront de vivre la vie en XR (mixed reality) de façon permanente (et choisie !).

La planète aussi va en bénéficier : moins de production de Hardware et d'extraction de terres rares, une fashion numérique qui petit à petit nous aidera à sortir de la fast fashion au travers d'une revalorisation de nos propriétés virtuelles. Nos avatars sont déjà partout. Demain, on peut imaginer qu'ils seront nos interfaces 3D avec le Metavers. Dès lors, on sait qu'on y sera avec tous nos objets (NFTs !) de chez Chanel, Louboutin, Lamborghini, Supreme ou autres... Donc moins le besoin d'acheter des vêtements qui utilisent du sweatshop labour pour être cool. Digital is cool !

Pardonnez-moi, mais je suis un Crypto-Techno-Utopiste pro-Transhumanisme... Personne n'est parfait. J'ai beaucoup foi en la tech car je la considère comme le reflet algorithmique et parfait de notre pensée humaine effective et exécutive, sans l'humain dans la boucle... Donc non. Pas de caprice. Plutôt un délice.

Eric Briones

Votre société DAOZ entend jouer un rôle clé dans le Web3, quel est-il ? Le luxe est-il compatible avec le web 3.0 ?

Benjamin Grauer

La société DAOZ est une expression très limitée de ce qu'est en réalité la DAO de DAOZ.eth. La société est uniquement une SAS liée aux comptes pro, et du coup plutôt "l'agence de production" de DAOZ. La DAO, c'est notre hive mind sur une blockchain. Nous sommes dans une transition où d'anciens modèles cohabitent avec des nouveaux, chaque jour les mains dans le cambouis. Nous adaptons les règles de l'ancien monde avec celles du nouveau, ses codes, son langage, sa philosophie. Entre les deux, il y a un gap. Chez DAOZ, nous bâtissons des ponts.

Le luxe est non seulement compatible avec le web3 mais il y est déjà intégré, en partie. Sans parler des nombreuses marques qui sont déjà sur le terrain. Gucci, Balenciaga, LVMH... Il y a une philosophie qui a beaucoup de points communs, sauf que cette fois-ci, c'est pour tout le monde !

La dimension de l'exclusivité et les codes très particuliers propres à chaque univers de marque sont assez proches de notre FOMO, Fear of Missing Out, l'envie d'en être. On a cette notion de club, de communautés avec ses codes, l'amour du travail bien fait. On peut confectionner des pièces digitales uniques comme on confectionnerait une pièce d'art, réelle et physique, mais sans les contraintes du tangible !

De nouveaux métiers d'art émergent également, et au-delà, le luxe a une longue histoire de collaborations artistiques. L'art donne au luxe son intemporalité. Sans artistes, le luxe devient simplement de la mode. Le web3 repousse les limites de la collaboration, en ouvrant grand les vannes contributives tant sur le contenu de la création que dans le contenant, et donc la façon dont marque et art se marient.

Mais en même temps, entrer dans le club ne demande pas forcément une situation financière privilégiée. Les DAO cherchent plutôt de l'engagement, de la participation, une contribution d'une manière ou d'une autre. N'importe qui peut "entrer", comprendre, communiquer, rejoindre une communauté, même exclusive, sans jugement sur son identité réelle, représentée publiquement par un avatar NFT (les fameuses PFP, Profile Pictures).

En fin de compte, le web3 apporte ce qu'on y amène. Littéralement. Et si le luxe est l'univers de l'imaginaire, une façon de raconter une histoire, des histoires, c'est exactement ce qui se passe dans le web3 : un espace de l'imaginaire. Tout y est possible.

Les seules limites sont celles de ce que l'on peut imaginer. Autant dire qu'il y a encore de la place pour tout le monde.

daoz benjamin Grauer

Exclusif

benjamin Grauer, sous forme de NFT ©DAOZ.eth

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