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Le petit lexique digital : Easter Egg

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Chaque mois, Laurent François décrypte les mots de nos identités numériques, en lien avec l’actualité.

/Easter Egg/: clin d’œil, objet digital caché au sein d’un jeu vidéo ou d’une production culturelle, détecté ou activé grâce à un code spécial ou à une mise dans la confidence par les utilisateurs avertis, ou en suivant des indices spécifiques. Ces éléments secrets, souvent placés pour divertir ou récompenser les fans les plus attentifs, peuvent inclure des références culturelles, ou des fonctionnalités supplémentaires non évidentes à première vue.

Les Easter Eggs font partie de la culture populaire, notamment dans les jeux vidéo. Un des exemples les plus marquants est la franchise Legend of Zelda. Dans chaque nouvelle version, des Easter Eggs sont à découvrir par les communautés de joueurs. Que ce soit la traduction d’une écriture runique qui dévoile une référence au premier épisode de la série, ou bien même l’inclusion de ces références à l’intérieur d’autres jeux, c’est toute une grammaire sémiotique qui se transmet à travers le monde, et s’étale dans le temps.

Easter Eggs et luxe : des relations complices

Pas étonnant que dans la mode en particulier, les Easter Eggs soient une source d’inspiration importante. Balenciaga en 2021 avait joué à plein la carte des codes cachés dans un épisode de 10 minutes des Simpsons, qui prit un an à être écrit et produit. Par exemple, le jet Balenciaga où le train d'atterrissage est remplacé par les fameuses Sneakers-Socks de la Maison. 

© The Simpsons | Balenciaga

Jonathan Anderson, lors du défilé Automne-Hiver 2024, a multiplié les allusions à Stanley Kubrick et notamment sa passion pour les chats.

Subtilité, et culture comme monnaie sociale

Mais les Easter Eggs permettent surtout de jouer avec les communautés d’insiders. Plus que de cultiver l’entre-soi, ces mécaniques permettent de remercier l’attention et le niveau de connaissance élevé des passionnés d’une marque en les plongeant dans de nouveaux univers dont ils sont vraisemblablement les seuls à comprendre les nuances. C’est exactement ce qu’a réussi Miu Miu lors de leur dernier défilé à Paris. The Truthless Times, un journal fictif distribué lors du show avec de nombreux essais philosophiques, était également disponible via des QR codes autour du photocall des célébrités. Les fichiers en format .pdf étaient accessibles dans un dossier hébergé sur le site web de Miu Miu. Une tactique low-tech mais totalement en phase avec le niveau de passion des fans de la marque, qui ont partagé les textes via leurs messageries instantanées. Une façon d’appliquer l’adage d’Arsène Lupin : "vous m’avez vu, mais vous ne m’avez pas bien regardé" en valorisant les publics les plus exigeants.

C’est aussi un moyen de s’affranchir des flux des réseaux sociaux, en apportant un élément disruptif dans la consommation de contenus. En forçant la réflexion et la curiosité, Miu Miu permet à travers ses Easter Eggs de reprendre une forme de pouvoir contre la domestication forcée par les plateformes. Une posture de hacker, en somme.





Laurent François est un dirigeant d’agence de publicité, spécialiste des stratégies créatives et digitales pour les maisons de luxe. Il est l’auteur de "Réseaux Sociaux : une Communauté de Vie" chez L’Harmattan et anime la newsletter "En Vivance".

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