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« Les grands groupes ont une responsabilité de soutien aux institutions culturelles » Blanca Juti, L’Oréal

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Le groupe numéro un des cosmétiques multiplie les initiatives culturelles et artistiques. Dernièrement, elle dévoilait ainsi un parcours co-imaginé avec le Louvre dédié à la beauté et ses diverses perceptions. Une façon pour le groupe français de réaffirmer son engagement envers l'histoire et la culture, tout en mettant en lumière ses activités d'une nouvelle manière. Une stratégie nouvelle que nous détaille Blanca Juti, directrice générale des relations extérieures et de l'engagement chez L'Oréal.

Journal du Luxe

Parlez-nous de votre rôle au sein du groupe L’Oréal ?

Blanca Juti

Je suis la directrice générale des relations extérieures et de l'engagement du groupe L'Oréal. Mon rôle est de garantir la réputation de notre groupe. Cela passe par ce que nous disons, mais aussi, et surtout, par nos actions. Nos équipes garantissent et prennent soin de l’engagement de notre communauté. Je suis en charge de la communication, des affaires publiques et de l’image de marque du groupe.

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Quelle est votre définition de la beauté et quelle est la définition de la beauté chez L’Oréal ?

Blanca Juti

Selon moi, la beauté est un besoin humain essentiel qui existe depuis toujours. Ceux qui peuvent penser que la beauté est superficielle ne voient pas en elle sa profondeur. La beauté rythme notre quotidien : nous commençons et nous finissons notre journée par des gestes de beauté. Les moments importants de la vie sont marqués par la beauté :  qu'il s'agisse d'un anniversaire, de la fête des mères, d'un premier rendez-vous amoureux… Même dans les moments les plus difficiles, la beauté peut aider.
La beauté est individuelle - il s'agit d'un moyen d’expression - mais elle est aussi très social.
La beauté est aussi une question culturelle. Chaque époque culturelle et chaque culture sont marquées par différentes normes de beauté. Dans les années 60 par exemple, la libération féminine est accompagnée par une nouvelle façon de se maquiller, de nouvelles coupes de cheveux, etc.
La beauté a aussi eu un rôle très fort lors de moments historiques : pendant la seconde guerre mondiale, Churchill par exemple ne voulait pas rationner les rouges à lèvres, parce qu’il s'agissait selon lui d’une forme de défiance. Récemment, un article du New York Times nous rappelait l'importance pour les femmes ukrainiennes de se rendre dans les salons de beauté pour se faire les ongles, même en temps de guerre.
La beauté est aussi une question d'harmonie, parce qu'elle est reliée au bien-être : on se sent beau quand on est heureux, quand on va bien et que l'on se sent bien dans sa peau. D'ailleurs, l'expression "se sentir bien dans sa peau" est plus qu'une expression physique, c'est l'expression d’un état d'esprit. Une résonance entre l'extérieur et l'intérieur.

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Après Lancôme et sa collection inspirée de la galerie Richelieu, c’est au tour du groupe tout entier de collaborer avec le Louvre à travers l’exposition "De Toutes beautés !". Dites-nous en plus.

Blanca Juti

Depuis mon arrivée chez L'Oréal, je m'intéresse à ce qu’est réellement la beauté et pourquoi certaines personnes peuvent penser qu'elle est superficielle. Nous avons beaucoup travaillé avec des scientifiques, des historiens, des anthropologues sur le sujet. Nous avons publié un livre en interne qui s’appelle "L’essentialité de la beauté" : on y parle de la beauté dans le passé et dans le présent, du rôle de la beauté pour affronter les moments difficiles de la vie.
On a aussi travaillé sur l'impact de la beauté sur la société, sur la culture et l’art. Le partenariat entre Lancôme et le Louvre avait fait naître une collection de produits. Avec "De toutes beauté !", il n’y a aucun aspect commercial, c’est du mécénat. C'est un partenariat de trois ans avec le Louvre pour lequel nous souhaitons mettre en avant trois choses : les gestes, les canons et l'évolution de la beauté dans la société. De là est né ce parcours ludique où ce sont les œuvres qui nous parlent à la première personne. En parallèle, nous allons dévoiler prochainement une web-série qui montrera les réactions des jeunes face à ces œuvres. Il est fascinant de voir comment un tableau, une sculpture, qui a 2000 ans peut raconter quelque chose d’encore nouveau aujourd’hui. Par exemple l'Hermaphrodite Endormie : quand les jeunes la voient pour la première fois, ils voient une femme magnifique, à l’aise et heureuse. Quand ils se rendent compte que c’est aussi un homme, la surprise est totale. Et c’est le moment où l’on constate que la notion de fluidité des genres était déjà présente il y a 2000 ans.

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Dans l’exposition "De toutes Beautés !", chaque oeuvre est présentée non pas comme un objet mais comme un sujet. C’est un storytelling qui plaît beaucoup à la jeune génération…

Blanca Juti

Effectivement. C'est intéressant de voir comment, dans la société occidentale, les canons de beauté associés à l’homme ont très peu changé. Il y a un Hermès fantastique dans cette exposition qui, d'ailleurs, pourrait être une publicité Armani d’aujourd'hui. À l’inverse, les canons de beauté pour la femme ont beaucoup évolué. La princesse de la maison d’Este de Pisanello que l’on rencontre dans le parcours démontre cela : sur ce tableau, elle apparaît les cheveux rasés. En effet, à cette époque, les femmes voulaient montrer qu'elles étaient le contraire des animaux, qu'elles étaient divines. Elles cherchaient à se différencier des animaux en retirant et rasant leurs poils. 50 ans plus tard, Bottichelli dévoilait à l’inverse des chevelures volumineuses, prouvant que les canons de beauté avaient déjà changé. Il est fascinant aussi de voir les canons de beauté dans d’autres cultures comme celle irakienne du roi Sargon II : les deux guerriers sont représentés avec une barbe tressée, de beaux bijoux. Cela rappelle l'esthétique des rappeurs d’aujourd’hui.

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Avec cette idée d’égalitarisme qui règne aujourd’hui, les canons semblent disparaître au nom d’une inclusivité reine. Est-ce plus difficile pour les marques d’imposer leur idéal de beauté ?

Blanca Juti

Nous avons a coeur de célébrer toutes les beautés. Notre groupe produit sept milliard de produits pour 2 milliards de personnes, toutes différentes. Nos marques essayent avant tout de célébrer la beauté de tout le monde. Bien sûr, chaque marque à son caractère, ses expressions, sa personnalité. Il y a des marques coréennes, des marques américaines, des marques européennes. Elles parlent à différentes personnes. Mais nos marques se veulent inclusives.

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L’exposition au Louvre, la web-série, la sortie du livre "100 000 ans de beauté", le podcast "This Is Not a Beauty Podcast"... Le groupe multiplie les projets culturels. Quelle est la place du culturel chez L’Oréal en 2025 ?

Blanca Juti

Nous avons effectivement accéléré notre développement sur ce secteur, notamment grâce à Delphine Urbach, directrice art, culture et patrimoine chez L’Oréal. Je pense que les groupes comme le nôtre ont une responsabilité de soutien aux institutions culturelles. D’autant que chez L’Oréal, l’idée est d’instaurer une véritable conversation et un échange avec ces institutions, il ne s’agit pas seulement d’offrir un soutien financier, cela va plus loin.

Retrouvez Blanca Juti lors de notre Live Intelligence spécial "Compétences et Emploi dans le luxe"

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