Retail : l'industrie du luxe renforce son parc immobilier
Publié le par Journal du Luxe
Dans un récent rapport, le cabinet de conseil Cushman & Wakefield revient sur les grandes tendances qui ont marqué le secteur du retail immobilier de luxe ces derniers mois à travers l'Europe. Polarisation géographique, course aux adresses d'exception, surfaces hors normes... Que faut-il en retenir ?
Des ouvertures trustées par un trio de tête
Une centaine d'ouvertures de boutiques, portées par les leaders de l'industrie. Selon la dernière édition de l'étude European Luxury Retail, les Maisons et grandes marques de luxe auraient inauguré l'année dernière quelque 107 boutiques sur un total de 20 artères-clés réparties à travers 16 villes et 12 pays d'Europe.
Au détail de ces implantations, les griffes de mode auraient représenté environ 60% des ouvertures, là où les montres et la joaillerie ont pesé pour 20%. Si cette répartition vient illustrer la place centrale du segment Mode et Maroquinerie dans le business modèle des Maisons, elle traduit également la prédominance des poids lourds du secteur puisqu'un tiers des ouvertures de boutiques de luxe en 2023 a été réalisé par des marques appartenant aux groupes Richemont (13%), Kering (11%) et LVMH (9%). Un trio qui a par ailleurs concentré ses efforts sur la France, l’Italie et le Royaume-Uni qui ont compté pour la moitié de leurs ouvertures.
Des loyers en hausse sur les artères du luxe
Au détail de l’Hexagone, la rue Saint-Honoré et l’Avenue Montaigne ont cumulé à elles seules neuf ouvertures de points de vente : des adresses très prisées, identifiées par les clientèles du luxe comme des destinations shopping privilégiées. Leur attractivité est d'ailleurs si forte qu'à fin 2023, l’Avenue Montaigne ne comptait plus un seul espace commercial vacant... Même tendance sur les Champs-Elysées, la rue Saint-Honoré et la rue du Faubourg Saint-Honoré où, sur la même période, moins de 4% des baux étaient disponibles.
Face à la demande pour ces emplacements premium polarisés, la pression sur les loyers s'est faite ressentir : l’année dernière, ces derniers ont grimpé de +3% sur les principales rues européennes identifiées comme étant des places fortes du luxe. Selon les experts, cette hausse pourrait se temporiser un peu pour s'établir entre +1 et +2% entre 2024 et 2027.
Des investissements immobiliers stratégiques
Moins d'emplacements disponibles, des loyers qui grimpent, mais aussi de nouvelles demandes. Salons privés à destination des VIP, espaces de restauration, salles d'exposition ou de démonstration... alors que l'expérience en points de vente s'impose comme un levier de captation pour les consommateurs de produits de luxe, les Maisons tendent désormais à plébisciter des locaux de plus en plus vastes.
L'année dernière, rien qu'à Paris, les ouvertures de flagships se sont multipliées : la plus grande des boutiques du réseau retail d'Alexander McQueen a vu le jour rue Saint-Honoré ; Bottega Veneta s'est offert 800m2 de surface de vente revisitée par son directeur artistique Matthieu Blazy Avenue Montaigne ; Saint Laurent a inauguré un vaisseau amiral sur les Champs-Elysées... De quoi laisser libre cours aux expériences les plus immersives et faire, peut être, la différence dans un secteur du luxe qui voit sa consommation se normaliser et nourrit de nouveaux enjeux autour de la captation et de la rétention des clientèles locales et de passage.
Une mutation de l'écosystème retail qui pousse les groupes à sécuriser leurs positions sur le long terme en renforçant leur parc immobilier en propre. Ces derniers mois, Louis Vuitton a ainsi acheté deux surfaces sur les Champs-Elysées dont un immeuble qui devrait bientôt accueillir son tout premier hôtel. Même dynamique pour Kering avec l'acquisition de biens immobiliers Avenue Montaigne et rue Saint Honoré. Le groupe a également investi il y a peu dans un immeuble de 11.800 mètres carrés situé sur la Via Montenapoleone, l'une des destinations luxe les plus prisées de Milan. Coût estimé de l'opération : environ 1,3 milliard d'euros.
L'Europe n'a du reste pas le monopole des stratégies immobilières puisque Kering a également annoncé avoir racheté un immeuble de 10.700 mètres carrés implanté au coeur de New-York, sur la Cinquième Avenue. Un investissement lourd de sens alors que les ventes opérées directement par les marques - en boutiques mono-marques et en ligne - devraient concentrer les deux tiers du marché du luxe d'ici à 2030.