Lexique digital Stans

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Le petit lexique digital : stans.

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Chaque mois, Laurent François décrypte les mots de nos identités numériques, en lien avec l’actualité.

 /Stan/ : nom qui désigne un fan excessivement impliqué, dévoué ou obsessionnel, en particulier dans le cas d’une célébrité spécifique ou d’une marque.

Les communautés de fans ne sont pas nouvelles ; les images de personnes en transe autour des Beatles ont fait le tour du monde. Mais, avec l'avènement des réseaux sociaux, c’est une toute nouvelle relation entre les fans et leurs idoles qui s’est construite. Les cris en face des caméras se sont transformés en milliards de partage, de “likes”, de fils de discussion à travers les réseaux sociaux.

La façon dont les communautés de stans naissent et se structurent révèlent de multiples opportunités pour les Maisons de luxe.

Le terme, popularisé en 2000 grâce à la chanson d’Eminem “Stan” (avec Dido) est en soi intéressant à déconstruire. Elle raconte l’histoire d’un fan qui développe une relation parasociale avec Slim Shady (l’alter ego d’Eminem), qui ne comprend pas que son idole ne lui réponde pas, jusqu’à conduire à la fin du clip à un massacre de sa famille et à son propre suicide. Une hyperbole qui a bien évolué depuis, avec des “stans” désormais bien plus liés entre eux et avec l’objet de leur attention. 

De l’être à l’action.

Lady Gaga, avec sa plateforme “Little Monsters”, a été précurseure. L’artiste a très tôt développé son propre réseau social dans lequel sa communauté a rapidement eu un rôle important autour de son travail créatif : appels à contribution, contenus partagés de façon exclusive et de façon beaucoup plus directe, visions du monde et forums de discussion. Little Monsters, c’est un nom, des symboles, et une forme d’idéologie.

Ce type de regroupement de fans a accéléré le passage d’un moment où aimer profondément l’univers d’une personnalité permettait de se définir soi, mais également de revendiquer son adhésion. Stan, qui était au début uniquement un nom, est désormais également un verbe, “I stan for” est fréquemment utilisé dans les conversations en ligne.  Ce qui veut dire que les fans deviennent également des activistes, et n’hésitent plus à mettre une certaine pression sur les maisons de luxe afin, par exemple, que leur idole puisse avoir une campagne internationale avec elles, ou au contraire à les défendre corps et âme quand elles sont attaquées.

Allégeance à la communauté.

Un élément important des communautés de stans est la façon dont elles prêtent allégeance ; et d’une certaine façon, organisent leurs actions dans le but de pousser leurs intérêts. Sur Discord, les membres du serveur UNDW3 (Lacoste) organisent fréquemment des “raids” sur les autres réseaux sociaux afin de pousser leur marque fétiche chaque fois qu’un sondage important ou un appel à contribution est sollicité. 

Les communautés structurées autour de Jisoo ont une impressionnante capacité à partager des informations, contenus ou initiatives qui gravitent autour d’elles, mais également à venir célébrer les initiatives créées autour d’elles par les marques.

Toutes les démarches ne sont pas aussi vertueuses : certains stans ont des démarches excessives, qui ressemblent à du cyber-harcèlement. Notamment autour des créateurs de contenus qui peuvent se voir non seulement exposés à leurs stans, mais surtout presque dépossédés de leur liberté d’expression ou du choix de travailler avec telle ou telle maison. D’où l’importance de cadrer assez vite les droits et les devoirs d’une communauté. Tout est politique.



Laurent François est un dirigeant d’agence de publicité, spécialiste des stratégies créatives et digitales pour les maisons de luxe. Il est l’auteur de “Réseaux Sociaux : une Communauté de Vie” chez L’Harmattan et anime la newsletter “En Vivance”.

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